Anatomie et choix d'un ciseau à bois
Pour bien choisir un ciseau à bois il est tout d'abord nécessaire de bien connaître l'anatomie de celui ci. Voici donc les principeaux constituants d'un tel outil :
L'angle du biseau
La valeur de cet angle résulte d'un compromis entre la facilité à couper le bois et la résistance et la durabilité du biseau affûté. On peut bien sûr changer cette valeur après achat et elle dépendra de l'utilisation que l'on veut faire du ciseau à bois.
La moyenne se situe aux alentours de 30° pour un ciseau polyvalent mais peut descendre à 25 (voire 17°!) pour un ciseau destiné aux ajustages et à l'enlèvement de faibles quantités de bois. Au contraire, l'angle d'affûtage des bédanes qui ne sont finalement qu'une espèce un peu spéciale de ciseau peut monter jusqu'à 40°, ce qui assure une bonne résistance à l'usure et aux gros efforts.
La forme de la planche
L'épaisseur de la partie métallique du ciseau (la planche) est directement liée à la résistance du ciseau. Ainsi les bédanes sont très épais (au moins plus épais que larges) car les efforts auxquels ils sont soumis sont très importants. Les ciseaux à bois plus classiques se contentent d'épaisseurs plus faibles de l'ordre de 5 à 6 mm.
Une grande longueur de planche permet quant à elle de minimiser les interférences avec la pièce de bois.
Dans une moindre mesure elle détermine l'aptitude du ciseau à bois à être appuyé sur une surface de référence. Plus la planche est longue et plus le ciseau sera stable. Par contre un ciseau avec une planche courte sera bien plus maniable.
La largeur dépend de l'utilisateur, qui préférera des dimensions métriques ou impériales, l'idéal étant de ne pas mélanger les deux ! Certains ciseaux spéciaux ont des formes plus spécifiques comme par exemple le ciseau ci contre, idéal lors de la fabrication de queues d'arondes recouvertes. D'autres présentent un biseau de biais (non perpendiculaire au corps). Le plus souvent on peut se fabriquer ces ciseaux spéciaux en usinant des ciseaux plus classiques (mais ça demande du temps et un peu de matériel).
La planche est parfois biseautée afin de pouvoir travailler dans des endroits difficiles d'accès. Lors de l'élimination du bois entre les queues d'arondes par exemple, il est très appréciable de ne pas être gêné par des bords à angles droits trop hauts. L'idéal est à mon avis de ne pas dépasser le millimètre. S'ils sont plus haut, la maniabilité en pâtit, s'ils sont plus bas il devient difficile de les appuyer contre le bois de façon précise. Enfin ce biseautage allège un peu le ciseau qui devient plus maniable. Les ciseaux ne présentant pas ce biseautage conviendront cependant dans 90% des cas et même dans 99% des cas si vous ne faites pas de queues d'arondes (on peut aussi usiner ce biseau soi même mais c'est beaucoup de travail).
Sur les ciseaux japonais, la planche est creusée afin de faciliter l'usinage de cette partie du ciseau à bois. En effet le dos du ciseau se doit d'offrir une surface absolument plane (le contour du "creux" forme une surface plane sur les ciseaux japonais) afin de venir s'appuyer correctement sur les surfaces d’appui de référence lors d'un travail de précision. Sur les ciseaux européens l'arrière du ciseau est entièrement plat, ce qui permet une durée de vie accrue (plus on affûte et plus le ciseau diminue de longueur) mais nécessite plus de travail pour atteindre une planéité parfaite.
Le métal utilisé est également affaire de compromis : s'il est très dur, il sera difficile à affûter mais l'affûtage sera extrêmement durable. Sil est trop « mou », prévoyez d'affûter (trop?) souvent ! Les miens ont une dureté de 60°Rockwel environ ce qui est à mon avis un bon compromis.
Sur certains ciseaux à bois le métal est damassé, ce qui est très joli, très cher et relativement inutile car les aciers modernes sont tout à fait à même de répondre tant aux exigences de facilité d'affûtage que de tenue de l'affûtage.
En remontant la partie métallique on trouve un dispositif de fixation au manche. Il y a deux techniques différentes :
Sur la première, la partie métallique présente une partie effilée appelée soie qui entre dans le manche. L'avantage, c'est que c'est facile à fabriquer et à changer. L'inconvénient, c'est que le manche a tendance à se désolidariser et à fendre car la soie se comporte comme un coin qui s'enfonce dans le manche. Pour éviter ces deux problèmes on ajoute un renfort appelé virole qui joue plus ou moins bien son rôle.
La deuxième technique est exactement inverse : c'est le manche qui s'insère dans la partie métallique qui présente alors un cône à son extrémité. Plus difficile à produire, cet assemblage présente aussi l'inconvénient de se désolidariser avec l'humidité. Attention à toujours saisir ce type de ciseau par la partie métallique! Par contre le manche absorbera bien mieux les chocs et ne fendra que très rarement.
Voir également plus bas pour d'autres avantages.
Enfin les ciseaux japonais combinent les deux techniques (cône + soie). Ils sont très résistants mais assez compliqués à fabriquer.
Le manche
Disons le tout de suite, j'ai une préférence pour les manches en bois qui présentent de nombreux avantages. Ils sont plus légers, plus chauds au contact et s'adaptent facilement à la forme de ma main en quelques coups de râpe et de papier de verre. Par contre ils sont un peu plus fragiles que leurs cousins en plastiques qui eux sont plus glissants et plus froids.
A vous de voir, le plus important étant de disposer d'un manche bien adapté à votre main.
Sur certains modèles les manches sont interchangeables, ce qui permet d'utiliser des manches courts pour la maniabilité et des manches longs pour la stabilité et la précision.
L'ensemble du ciseau doit être bien équilibré. L'outil doit être ressenti comme une extension naturelle du corps. L'idéal est donc bien sûr d'essayer avant d'acheter !
Voici pour l'analyse en détails. Mais finalement que vous faut il vraiment ?
Et bien comme toujours il n'y a pas de réponse toute faite et cela dépend bien sûr de votre utilisation. Cependant voici tout de même quelques pistes :
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Quelques ciseaux à bois bas de gamme pour les travaux grossiers dans la maison. Il serait dommage de racler les joints de carrelage ou de forcer l'ouverture d'un pot de vernis récalcitrant avec un ciseau à 60€ ! Évitez tout de même les tout premiers prix mais ne vous ruinez pas pour acheter ces 4 ou 5 ciseaux dont les largeurs se situeront entre 4 et 20 mm (à répartir en fonction des ensembles proposés en grande surface).
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Trois ou quatre ciseaux de bonne qualité. Planéité de la planche du ciseau, qualité d'acier, bonne finition, ne lésinez pas ! Vous vous en servirez avec plaisir toute votre vie! Le premier fera aux alentours de 12-13 mm de large, les suivants étant plus étroits (4-6 mm) et plus larges (25-30 mm), les autres en fonction de vos besoins.
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Éventuellement un ou deux bédanes pour les tâches demandant un biseau solide, plusieurs en fonction de vos besoins spécifiques si vous prévoyez de creuser vos mortaises à la main (mais qui le fait encore ? On est tout de même au 21ème siècle!)
- Un maillet et un tranchet : le premier vous permettra d'épargner au maximum le manche du ciseau et le deuxième vous fera une ligne permettant d'y insérer le tranchant et ainsi de placer correctement l'outil.
Dans tous les cas, affûtez les avant de vous en servir ! Il est malheureusement très rare d'acheter des ciseaux prêts à l'emploi !