Américains et Français : des techniques et des ateliers différents
A la recherche de vidéos de menuiserie sur internet, vous êtes tombé sur les excellentes vidéos de Marc, les trouvailles de Matthias ou les cours de Shannon. Même si elles sont en anglais, toutes ces vidéos sont extrêmement bien faites et mettent en œuvre des techniques très intéressantes.
Cependant, avez vous noté les différences entre la menuiserie anglo-saxonne et la menuiserie française? Et oui la différence de langue n'est que le sommet de l'iceberg!
Je vous propose ici un inventaire des principales différences entre les techniques, principalement américaines (mais partagées par les québécois notamment), et les techniques françaises.
Les mesures :
Là où nous utilisons avec bon sens le mètre et ses subdivisions, les résidents outre-atlantique s'obstinent à mesurer comme des pieds avec leurs pouces et des 64e. Même si cette espèce d'anglo-saxons conduit du bon coté de la route, je vous déconseille de lui emprunter son double décimètre (il ne sait même pas ce que c'est et s'en moque!).
Cette tendance fâcheuse se retrouve évidemment partout et notamment dans les diamètres de queues de fraises de défonceuse. Ils utilisent du 6,35mm (1/4pouce) et du 12,7mm (½ pouce). Attention d'avoir des pinces compatibles si vous décidez d'acheter vos fraises là bas (voir aussi les paragraphes suivants).
Plus sérieusement chacun a ses habitudes qu'il sera difficile de changer...
La dégauchisseuse :
Autant je ne suis pas près d'abandonner mes millimètres, autant j'adopterais facilement une de leurs dégauchisseuses! La plupart du temps, c'est une machine unique, découplée de la raboteuse, dont la longueur des tables m'a longtemps rendu jaloux! Même si la largeur est restreinte (il existe des astuces pour s'affranchir ponctuellement de ce problème), c'est bien la longueur qui prime sur ce genre de machine. Force est de constater que nos tables qui peinent à dépasser le mètre 80 font pâle figure à coté des leurs.
Le prix des machines :
Comment font ils pour avoir des prix jusqu'à 2 fois moins élevés que chez nous? Est ce les prix français (voire européens) qui sont surévalués ou les prix américains qui sont hyper compétitifs? La différence de TVA n'explique pas tout! A titre d'exemple, même une défonceuse of1400 de Festool à 640€ ne vaut que 560 dollars (430€). Le monsieur Festool que j'ai rencontré il y a peu m'a expliqué qu'ils devaient s'adapter au marché local... Moi j'aimerais bien qu'ils s'adaptent aussi à mon portefeuille local !
La tension du courant :
A la lecture du paragraphe précédent vous vous êtes décidé à acheter une machine américaine? Aïe! Autant vous le dire tout de suite, vous allez au devant de graves déconvenues. Outre le problème de la forme de la prise et des soucis de SAV, le principal écueil c'est la tension du courant électrique : la plupart de leurs machines fonctionnent en 110V (nous c'est 220). On pourrait se dire que ca tournera 2 fois plus vite mais malheureusement ce n'est pas tout à fait comme cela que ça marche... Quant à la solution du transformateur, c'est une idée onéreuse et bien contraignante!
Si vous décidez d'acheter outre-atlantique malgré tout, n'oubliez pas que tous les achats dépassant un certain montant passent par la douane qui vous fera payer la TVA en plus de celle des Etats-Unis (ou du Canada), plus quelques frais annexes qui augmentent la facture d'environ 25%...
Ce sont (en gros) des lames très épaisses et réglables qui se montent sur la scie circulaire et qui permettent de faire des rainures, des tenons etc. Même si comme moi vous trouvez cela très pratique, c'est malheureusement interdit en France. De toute façon nos machines ne sont pas adaptées à recevoir ce genre de lame (alésage de diamètre différent et trop court en France, ouverture trop étroite dans la table). Au pire il y a bien la lame ténor mais son épaisseur est fixe (8mm).
Les fabricants d'outils et de machines :
Si Lurem ferme chez nous, Powermatic, Delta, Dewalt semblent bien se porter. Y aurait il une corrélation avec le prix des machines (dans un sens ou dans l'autre)? Difficile à dire! Toujours est il que les fabricants français se font rares voire inexistants et c'est bien dommage. Nos ministres préconisent parfois d'acheter français et je ne demanderais que ça mais dans le cas de la menuiserie cela semble de plus en plus utopique.
Enfin le nombre de sites/blogs, revues aux Etats-Unis est incalculable et la communauté "boiseuse" est très étendue. C'est l'avantage d'avoir une langue comprise par un très large auditoire!
Avec tout cela il nous reste cependant quelques raisons de les rendre (un peu) jaloux :
Les chariots ras de lame :
C'est une espèce inconnue chez eux (en tout cas dans les ateliers amateurs). Même s'ils ont des montages qui permettent de s'en passer, c'est un « accessoire » qui leur fait souvent envie (nananère).
Les toupies :
Là ce n'est plus un accessoire mais carrément une machine qui « manque »! Très peu d'américains sont équipés de toupie et ils se contentent de la défonceuse sous table. Pas de fraise à tenon, pas de fraise à rainer, pas de grand calibreur... Ils ont bien sûr des moyens de s'en passer (voir les lames dado par exemple) et les pros sont équipés mais cela reste tout de même une différence majeure avec nos habitudes !
Le style :
Bon d'accord c'est une affaire de goût mais les meubles américains ont souvent des styles que je me contenterai de qualifier de "différents" (pour la plupart des réalisations présentes dans les magazines)… Allez un peu de chauvinisme ne fait pas de mal ! Et puis la mode, l'art, le style c'est nous !... C'est bien connu !
Enfin on pourrait essayer de prétendre que c'est chez nous que l'histoire de la menuiserie a vraiment commencé il y a quelques siècles mais j'avoue avoir des lacunes concernant l'histoire des techniques des indiens!
Ce petit inventaire pas forcément exhaustif montre que l'on ne travaille pas le bois tout à fait de la même manière mais ces différences restent cependant minimes et l'envie de faire des copeaux qui nous réunit n'a pas de frontières!
Vive la menuiserie mondiale!